1 juin 2007

Interview de Mr Pascal REGEN, président de la CSNDPP


M. Pascal REGEN : Président de la Chambre Syndicale Nationale des Dépositaires de Produits Pharmaceutiques


  1. Estimez-vous que le système de santé français est un axe de rayonnement stratégique pour la France ?

Oui, cela devrait l’être. C’est un bon système, accessible à tous. La France a des acquis mais a perdu son avance. Plusieurs raisons à cela

  • le problème de la recherche ;
  • les pôles de compétitivité ;
  • la pénurie des personnels de santé ;
  • un problème de gouvernance.

La recherche:

Notre pays forme des gens brillants qui s’expatrient à cause de conditions défavorables (matérielles et environnement) pour eux en France.

La recherche coûte de plus en plus cher. La recherche se fait principalement par l’industrie pharmaceutique et donc par des fonds issus du privé. En comparaison, la recherche publique est très faible. L’industrie pharmaceutique se mondialise et les investissements pour la recherche également. Les financements se font à une échelle internationale. Le rythme des innovations s’est ralenti. Le financement de la recherche à l’heure actuelle demanderait des fond colossaux qui ne peuvent à être pris en charge à la seule échèle d’un pays.

On ne peut pas avoir de rayonnement sans une recherche performante et organisée. D’autre part, nous sommes confrontés à un problème de mentalités certain, notamment dans les relations entre public et privé. Il n’y a pas pour le moment une véritable synergie entre les acteurs du public et du privé. Il y a un décalage d’approche et de conception vis-à-vis du fonctionnement de la recherche.

Les pôles de compétitivité:


Ces pôles démarrent seulement en France et sont encore loin d’être opérationnels. Nous sommes très en retard par rapport à un pays comme les Etats-Unis où les pôles de compétitivités ont fait leur apparition dans les années 60 et sont pleinement opérationnels depuis les années 80. Autrement dit, nous avons un décalage effectif d’une trentaine d’années avec les Etats-Unis (1980-2010). Ce qui est peut être inquiétant c’est que l’on se lance seulement maintenant dans le développement des pôles de compétitivité.

Il est essentiel de faire collaborer le public et le privé. C’est une démarche difficile en France car on a une mauvaise image du privé.

La culture anglosaxone est beaucoup plus avancée que nous en matière de relations public/privé. Le public externalise certaines activités vers le privé. Nous avons des visions très différentes de l’investissement. Si l’on considère l’exemple des hôpitaux, l’externalisation pourrait permettre de réduire les charges que les hôpitaux français supportent.

La pénurie des personnels de santé:

L’instauration des numerus clausus était nécessaire à un moment où il y avait beaucoup de médecins mais aujourd’hui nous sommes confrontés à une pénurie.

Les contraintes des métiers des personnels de santé (médecins ou infirmiers) ne sont pas compensées par les salaires ou les conditions de travail. On assiste pour les infirmières à des cessations d’activité fréquentes dues à ces contraintes.

En conséquence, de nombreux médecins urgentistes viennent de l’étranger et parlent souvent mal notre langue. C’est le même problème pour les infirmières. A cause de cette pénurie, on fait venir du personnel de l’étranger.

De plus, si la pénurie de médecins s’accentue, dans les ruralité, les infirmières et les pharmaciens pourraient être autorisés à prescrire certains produits de base. Les médecins s’y opposeraient mais si nous n’avons pas le choix, nous y viendrons.

La question de la rémunération joue un rôle clé qui pèse sur la démographie médicale.

Une mauvaise image:

On ne sait pas mettre en valeur la santé. On montre seulement ce que cela coûte et pas ce qui a été investi. On oublie les avancées majeures de ces dernières années.

La conséquence en est une mauvaise image de l’industrie pharmaceutique dans l’inconscient collectif. Le secteur est mis au même rang que les industries de l’armement ou du tabac.

C’est un vrai problème et cela ne facilite pas les choses pour trouver des capitaux.

Nous sommes dans un système de culpabilisation des professionnels de santé avec le gouvernement dans le rôle du culpabilisateur. Il y a une incompréhension de la part des pouvoirs publics. La santé est gérée par des comptables. On a l’impression que le Ministère de la santé ne s’attache qu’à gérer les finances de la sécurité sociale.

En conclusion, la France est techniquement très performante sur le secteur de la santé mais il y a un problème d’image et de gouvernance. Il faut tout faire pour garder notre spécificité et notre avance sur le secteur. Il faut sortir de la logique de culpabilisation. Nous avons la culture, nous avons les bases mais nous nous sommes engagés sur un mauvais chemin.

  1. Quelles sont vos relations avec les autres acteurs de la santé ?

Les acteurs de la santé essayent de s’allier plus qu’avant mais il y a toujours des intérêts divergents. C’est donc une intention difficile à mettre en œuvre. Les pouvoirs publics ont aussi à intérêt à diviser pour mieux régner.

La CSNDPP travaille surtout avec la Chambre Syndicale de la Répartition Pharmaceutique (CSRP), tous les syndicats de pharmaciens, le LEEM et les membres de la FEFIS.

A l’inverse, la CSNDPP a peu ou pas de relations avec les syndicats de médecins. Cette tendance devrait évoluer car la distribution des échantillons de médicaments qui se faisait par les visiteurs médicaux est interdite depuis l’année dernière. Les dépositaires de produits pharmaceutiques ont pris le relais et une relation devrait s’établir entre les deux acteurs.

Il n’y a pas non plus de relation avec des acteurs européens ou internationaux, les métiers des dépositaires étant des fonctions très nationales.

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