31 mai 2007

Interview Fédération Hospitalière de France



VINCENT Gérard

Délégué Général de la FHF



1. Pensez-vous que, de manière générale, le système de santé français soit un axe de rayonnement stratégique de la France ?


L’image du système de santé français à l’étranger est très bonne. Nous pouvons être fiers de ce système unique et envié, dont les résultats sont sans équivalent dans le monde.

En termes de résultats, le système français est donc clairement un axe de rayonnement stratégique pour la France. Cependant, la complexité de l’organisation de ce système et donc la difficulté à l’expliquer et à l’adapter à l’étranger font qu’il est très difficile à vendre dans les réunions internationales. Par exemple, comment expliquer les incohérences des différents modes de cotisation quand on souhaite servir de modèle.

Le système anglais, malgré ses défauts notamment de temps de prise en charge des patients dû au manque d’offre de soin, n’en reste pas moins beaucoup plus clair et rationnel, donc plus aisé à exporter.


2. Si le système dans sa globalité sera très difficile à adapter à l’étranger, quels sont les points forts qui peuvent néanmoins servir de modèle ?

Plusieurs éléments font la réussite de notre système de santé, et seraient intéressant à adapter dans les pays développés et en voie de développement.

Tout d’abord, la coexistence des structures publiques et privées permet une prise en charge rapide et optimale des patients. 23% des lits en France sont dans des structures privées (1er mondial) ; le second est l’Allemagne avec 8%. Rares sont les autres pays à avoir des hôpitaux privés ou équivalent. Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Les avantages sont réels, tant que l’organisation favorise une concurrence saine entre les deux. Les listes d’attentes sont considérablement réduites, ce qui est un des principaux critères de satisfaction des malades. Contrairement à la plupart des autres pays, l’offre de soin est ainsi adaptée à la demande.

Dans la continuité du premier point, le modèle du privé (PSPH et cliniques commerciales) mérite d’être analysé par les systèmes de santé étrangers, car il constitue un complément efficace et efficient au service public. Cela permet de réduire les files d’attente, car les moyens du privé permettent de construire très rapidement de nouveaux lits.

Enfin, il semble indéniable que les pôles d’excellence que constituent nos CHU doivent être valorisés à l’échelle internationale. Ces structures de recherche et d’enseignement (en plus des services de soin) peuvent servir de modèle à l’étranger. D’ailleurs, l’AP-HP, l’AP-HM et les Hospices Civils de Lyon ont déjà beaucoup d’échanges avec d’autres pays (cf. : Etude FHF sur la Coopération hospitalière internationale pour développer le système français). Mais ce sont surtout des pays en développement qui bénéficient de ces échanges, et peu les pays développés. Cela s’explique entre autre par la barrière de l’anglais qui constitue un obstacle que les hôpitaux français ont beaucoup de mal à franchir.

3. Quel pourrait être le rôle de la FHF si l’opportunité de l’exportation du modèle de santé français se présentait ?

Un des gros problèmes des français dans les réunions internationales reste l’anglais. Comment vanter et défendre le système complexe qui est le notre lorsqu’aucun des directeurs de CHU n’est bilingue ? Cela reflète bien le caractère casanier français.

Cela évoluera avec le temps et l’arrivée des nouvelles générations mieux préparées, mais pour le moment, nous sommes incapables de convaincre sur le fond les dirigeants étrangers.

En ce qui concerne l’exportation du modèle en lui-même, il me semble difficile pour la FHF d’y jouer un rôle essentiel. En effet, si les autres pays ont besoin de changer leur système en prenant modèle sur le notre, ce n’est sans doute pas en matière de structure publique que les changements seront profonds. Les autres pays ont déjà une organisation hospitalière publique. C’est plutôt du côté du privé qu’il y a des changements à apporter.

Le seul apport que la FHF pourrait faire serait dans le domaine des CHU, pôles d’excellence (soins, recherche et enseignement), qui n’existent pas dans certains pays. Les nombreux contacts qu’a la FHF avec des structures étrangères concernent souvent ce point là.

4. Quelles sont vos relations avec la FHP ? Vos désaccords peuvent-ils être dépassés dans ce but de rayonnement stratégique ?

Les relations avec la FHP et la SCS existent, mais elles sont souvent difficiles. Nos intérêts divergent régulièrement.

Dans le cadre du développement de l’image du système français, c’est d’ailleurs plus ces organisations qui auraient un grand rôle à jouer, tout en étant sûr que l’égalité d’accès au soin serait garantie.

5. Quelles sont les initiatives françaises qui valorisent notre image ?

Nous développons régulièrement des initiatives internationales. Leur réussite valorise notre système.

Par exemple des projets existent avec le GIP Santé Protection Sociale Internationale (partenaire du récent rapport sur la coopération hospitalière internationale), ou avec le GIP Esther (Ensemble pour une Solidarité Thérapeutique Hospitalière En Réseau) qui, en s’appuyant sur des experts et des fonds français, aide à l’achat de médicaments contre le SIDA dans les pays en développement. Ce système est basé sur le jumelage entre un hôpital français et un hôpital étranger. Mais ces projets de coopération internationale ne se développent qu’avec des pays francophones, toujours à cause de la barrière de la langue.

Le projet Unitaid de Douste-Blazy qui consiste en une taxe sur les billets d’avions servant à construire des hôpitaux est un autre exemple d’initiative reconnue internationalement.

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