31 mai 2007

Interview SML


Dr Dinorino Cabrera

Président du Syndicat des Médecins Libéraux


  1. En tant qu’acteur du système de santé, dans quelle mesure pensez-vous que la santé est un axe de rayonnement stratégique pour la France ?

Nous devons plutôt parler d’accès aux soins et non de santé. La santé, hélas n’est pas donnée à tout le monde, et ne peut nullement être garantie. L’accès aux soins doit se faire sans discrimination. Mais, un accès égalitaire pour tous est un vœu pieux. Il faut parler d’équité. Dans notre pays, des gens sans couverture maladie ne pouvaient pas se faire soigner et la CMU-C fait en sorte qu’ils puissent l’être. Ce qui est curieux, c’est qu’il y a une ambivalence : quand on paye, on demande des droits, mais certaines personnes qui disposent de la CMU-C s’octroient davantage de droits que les autres du fait de la gratuité. Par conséquent, la CMU-C agace parfois les médecins.

Un Service performant représente un coût, et tout patient est dédouané, en grande partie, de cette charge. Il faut faire en sorte que l’accès aux soins soit le plus performant possible, mais en sachant que tout le monde ne peut pas accéder à tous les soins, certains n’étant pas pris en charge par l’Assurance maladie.

La santé, chacun y aspire, mais il ne faut pas considérer en tant qu’individu que tout est du. Les personnes doivent être soignées comme il se doit. Après, cela nécessite un plan concret partant de la prévention et de la recherche. Aujourd’hui, nous soignons beaucoup mieux en France car de fortes sommes ont été investies. La maladie d’Alzheimer sera sûrement la prochaine grande campagne de santé publique. En effet, on ne connaît pas grand-chose sur cette maladie et les efforts quant à la production d’un nouveau médicament ayant la capacité d’améliorer la vie des malades, doivent être intensifiés.

La forte mobilisation contre le cancer coûte beaucoup d’argent. La prévention, elle, coûte beaucoup moins. Cependant, un simple message ne suffit pas et il faut passer par des actions concrètes fortes. Nous devons tout faire pour prévenir plutôt que de se contenter de traiter.

Pour ne prendre qu’un exemple : le taux d’alcoolémie au volant à 0,5, considéré par certains inconscients comme trop bas. Il faut, au contraire, le réduire pratiquement à zéro. L’alcool au volant engendre un coût social et moral intolérable. Il faut une action de santé publique forte sur cette question.

Les médecins peuvent jouer un rôle dans ce processus, mais ne sont pas toujours de « bons élèves ». De nombreux médecins fument. Les médecins, comme tout le monde, ne sont pas des saints.

  1. Quelle opinion avez-vous quant au potentiel d’exportation de notre modèle de santé ?

L’exportation de notre système de protection maladie dans les pays émergents est complexe. Les pays émergents sont des pays pauvres. Les médicaments dans ces pays là sont hors de prix par rapport au pouvoir d’achat moyen. Essayer de les aider par la taxe sur les billets d’avion, promue par le Président Chirac, est une bonne initiative. Elle ne suffit pas à elle seule.

Il faut d’abord pouvoir mesurer le niveau de santé de ces populations. La France et les pays riches sont égoïstes par rapport aux pays émergents. L’export de certains médicaments ou techniques dans les pays riches est plus probable et potentiellement créateur de valeur.

La base du problème demeure les finances des pays émergents et la façon dont on peut les aider. La cause principale est le coût des médicaments et du savoir-faire. L’installation du matériel médical a déjà été tentée, mais le savoir-faire pour la maintenance ne suit pas. (exemple d’un IRM en Afrique).

  1. Avec quels acteurs pourriez-vous collaborer pour atteindre cet objectif ? Médecins et autres acteurs comme organisateur, pharmaciens, caisse primaire. Et quelles sont vos relations avec les autres syndicats de médecins.

Le CSMF dans son ensemble a des orientations semblables à celle du SML. Ces deux syndicats convergent dans leurs analyses. Avec MG France des rapprochements existent quant à la nécessité de revaloriser l’exercice quotidien du médecin généraliste, mais divergent sur l’organisation de notre système de soins.

Le SML s’est engagé dans la dernière réforme de l’Assurance maladie et a signé une convention avec la Sécurité sociale pour optimiser les dépenses de soins et permettre la revalorisation des actes médicaux qui sont trop bas et qui poussent les médecins à travailler beaucoup trop. D’autres organisations ont refusé de s’engager dans cette voie.

  1. A part ce souci de rémunération, pourriez-vous vous entendre dans le cadre de tables rondes de réflexion ?

Pendant les élections pour désigner les représentants des syndicats aux Unions régionales des médecins libéraux, les querelles et surenchères démagogiques ont altéré les rapports entre les syndicats. Parfois, le diagnostic est commun mais les traitements proposés diffèrent.

Mais, une analyse commune est possible sur les grands enjeux de santé nationaux tels que les personnes âgées, le handicap, etc.…

  1. Quels moyens seriez-vous prêts à mettre en œuvre ?

Des exemples existent. Dans les spécialités chirurgicales, les techniques évoluent très vite et on parvient à s’approprier rapidement les meilleures techniques du monde. Ce type de phénomène pourrait à plus grande ampleur se répéter pour l’export de notre modèle de santé.

En Europe, les systèmes de santé convergent lentement. En France, on peut à tout moment consulter un médecin de notre choix, et ceci n’est pas le cas partout. Mais, c’est le système de remboursement qui varie le plus en Europe. Il existe différentes positions selon les pays, les visions sont calquées en fonction du système de protection sociale qui leur est propre.

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